« Chers amis, le monde bouddhiste est plongé dans les ténèbres. Le bouddhisme tibétain a perdu, en cette vie, l’un de ses plus grands porte-flambeaux et maîtres, Sa Sainteté Künzik Shamar Rinpoché. La tradition karma kagyü a perdu un chef suprême et l’un des détenteurs de notre lignée. Et j’ai perdu mon maître, mon père spirituel. »
Thayé Dorjé, le XVIIe Gyalwa Karmapa, dans un message enregistré depuis le
Karmapa International Buddhist Institute (KIBI) à New Delhi en juin 2014.
Au petit matin du 11 juin, à son siège européen principal de Renchen-Ulm (Allemagne), le XIVe Shamarpa, Mipham Chökyi Lodreu, est décédé à l’âge de 62 ans d’une insuffisance cardiaque, laissant ses innombrables disciples à travers le monde dans un choc profond. Il venait de terminer plusieurs jours d’enseignements.
À son décès, son esprit est entré dans l’état de méditation post-mortem connu sous le nom de tukdam. Deux jours plus tard, lors du jour propice de la pleine lune de Saga Dawa, Shamar Rinpoché a quitté cet état, montrant tous les signes de la bouddhéité. En présence de son kudung (mot honorifique désignant les restes d’un maître accompli), de nombreux rinpochés, lamas et pratiquants du monde entier se sont joints aux prières et aux pratiques dans la salle du cimetière de Renchen-Ulm.
Dans son message le jour du décès de Shamar Rinpoché, le Gyalwa Karmapa écrit :
Même les êtres exceptionnels meurent : le Bouddha lui-même a quitté son corps. L’impermanence de la vie fait partie du message et des enseignements fondamentaux du Dharma. […] Sa Sainteté Shamar Rinpoché a été et continue d’être notre enseignant, et ses souhaits et ses bénédictions nous accompagneront toujours. […] Demandons-lui de revenir pour notre bien à tous, afin qu’il nous guide vers l’éveil.
Le Gyalwa Karmapa s’est ensuite rendu en Allemagne pour accompagner la dépouille de Shamar Rinpoché en Inde (Delhi et Kalimpong), au Bhoutan et au Népal, au cours d’une période de deuil de 49 jours, avant sa crémation à Katmandou le 31 juillet (ceci fera l’objet de notre rétrospective du mois de juillet).
Dans son dernier enseignement donné quelques jours avant son décès à Renchen-Ulm, Shamar Rinpoché avait affirmé :
Vous n’avez pas besoin d’avoir peur de la mort si vous savez comment pratiquer dans la mort.
Conseillant ses disciples endeuillés, le XVIIe Gyalwa Karmapa a dit :
Il en va de même dans la vie. Tant que nous restons concentrés sur notre pratique, fidèles à notre essence, à notre richesse intérieure, à nos valeurs innées de compassion et de sagesse, il n’y a pas lieu d’avoir peur. Car le décès de Shamar Rinpoché est porteur d’un grand enseignement, l’enseignement de l’impermanence, la leçon que tous les êtres, même le Bouddha lui-même, doivent apprendre. Chers amis, il est très important qu’en tant que pratiquants, nous ne nous laissions pas guider par nos émotions. C’est donc un moment pour la sagesse, un moment pour la responsabilité. En ce moment, nous devons nous concentrer sur notre pratique.
Sa Sainteté a assuré à ses disciples qu’en tant que bodhisattva supérieur, Shamar Rinpoché renaîtrait grâce au pouvoir de sa compassion pour tous les êtres et à ses prières pour le bien d’autrui. Il a ajouté :
Prions et méditons tous ensemble pour le bien de tous les êtres, unis par l’amour bienveillant et la compassion.
Dans Audace et Tradition [1], un hommage au XIVe Shamarpa, Karma Trinlay Rinpoché rappelle que bien avant sa mort, Shamar Rinpoché avait prévenu nombre de ses disciples qu’il ne vivrait pas très longtemps et qu’il allait bientôt nous quitter, tout en évoquant de nombreux projets.
Rétrospectivement, ceci m’apparaît comme son ultime testament, ses dernières instructions concernant ce qu’il souhaitait accomplir. Il s’agissait de sa manière habile d’associer ses disciples au grand mérite de sa vaste activité éveillée. […] Shamar Rinpoché nous a montré comment le sens de la vie réside dans l’exercice de la bodhicitta. Sa propre mise en œuvre devrait nous inspirer à suivre son exemple.

Dans sa dernière interview, donnée à Dhagpo Kagyu Ling deux semaines avant son parinirvana, Künzik Shamar Rinpoché nous a donné une leçon prémonitoire sur l’impermanence.
Tout, tout est impermanent. Rien n’est permanent, vous devez comprendre cela. Par conséquent, vous ne devez pas être surpris lorsque quelque chose change.
Le 20 octobre 2019, Trinley Thayé Dorjé et Ogyen Trinley Dorjé ont publié une prière commune pour la longue vie de Künzik Shamar Rinpoché et sa réincarnation.
Dans la dimension véritable des phénomènes,
le vaste espace de la félicité et de la vacuité immuables,
elle confère la gloire de la vie,
essence pure de l’existence et de la paix,
par le déploiement du filet magique incessant.
Puisse la bhagavati Tara, la roue qui exauce les souhaits,
conférer vertu et excellence.
Détenteur du trésor des secrets
du corps, de la parole et de l’esprit
de Karmapa, qui incarne
l’activité de tous les victorieux,
vous êtes le nirmanakaya
Mipham Gargyi Wangchuk.
Enseignant et étudiant indifférenciés,
puissiez-vous vivre longtemps !
Puissent les instructions de la véritable lignée
de la réalisation s’écouler dans votre esprit !
Puissiez-vous être riches de l’océan de qualités
de l’étude et de la pratique !
Puissiez-vous mûrir et libérer les êtres
qui vous voient, vous entendent et se souviennent de vous !
Puissiez-vous vivre longtemps comme le maître,
utile à tous pour ceux qui établissent un lien avec vous !
Puissé-je, en cette vie et dans toutes les autres,
suivre Karmapa et ses fils de cœur inséparables,
accomplir toutes mes intentions en accord avec le Dharma, et, ultimement, unifier mon esprit au leur pour ne faire qu’un avec eux !
Pareille au soleil qui se lève rapidement, la réincarnation de l’omniscient détenteur de la coiffe rouge, Mipham Chökyi Lodrö, apparaîtra bientôt. Avec la fervente aspiration qu’elle puisse vivre longtemps, que son activité fleurisse et que, par ce pouvoir, les enseignements de la lignée de pratique karma kamtsang soit unifiés, nous deux, connus sous les noms d’Ogyen Trinley et Thayé Dorjé, nous avons écrit cette prière ensemble. Nous l’avons conclue par les paroles véritables de Gyalwang Mikyö Dorjé, qui l’ornent en tant que stance finale. Puisse ce travail participer à répandre les enseignements et à apporter du bonheur aux êtres, et puissent les bouddhas et les bodhisattvas le faire advenir !
Écrit en Europe le 22e jour du huitième mois tibétain de l’année cochon-femelle, le 20 octobre 2019.
[1] Karma Trinlay Rinpoché. Audace et tradition : Shamar Rinpoché. Portrait d’un maître de notre temps. Rabsel Publications. La Remuée. 2019. pp. 117-119.
Ces photos proviennent de nos archives ou ont été recueillies dans le cadre des recherches pour les 50 ans de Dhagpo Kagyu Ling. Nous n’avons pas pu identifier tous les auteurs. L’utilisation des photos est à titre informatif dans le cadre de la célébration des 50 ans de Dhagpo Kagyu Ling. Leur usage est limité à cette actualité et à notre site et n’est pas à usage commercial
Événement
Pour commémorer cet événement, nous nous retrouverons pour une journée de pratique sur place au temple.
Elle sera suivie d’une conférence sur la vie de Künzik Shamar Rinpoché, donnée par Trinlay Rinpoché à l’Institut, retransmise en ligne et traduite en plusieurs langues.
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